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Numéro coordonné par Audrey Tuaillon Demésy
Le thème de l’identité fictive est de nouveau abordé dans ce seizième numéro d’¿ Interrogations ?. Dans la continuité des axes développés précédemment, d’autres ’emplois-clés’ du concept sont présentés ici, faisant aussi bien appel à la sociologie qu’à la littérature, en passant par les sciences du langage ou l’ethnologie.
Faisant suite au volume précédent et le complétant, celui-ci est organisé selon deux thématiques distinctes. D’abord, c’est l’identité en lien avec le corps qui est questionnée. Pour ce faire, Christophe Becker nous propose de comprendre la construction identitaire à l’aune de performances corporelles, en prenant comme thème les textes de William Burroughs, tels qu’appliqués à travers le body art de Breyer P-Orridge. Ensuite, Emmanuel Chaput, sous un angle philosophique, examine le tatouage comme un support permettant de comprendre les relations entre plèbe et élite durant la période Edo. Puis Fernando Carvajal Sanchez traite de la question des phénotypes en Amérique Latine. Ceux-ci, abordés sous l’angle des représentations de soi, participent au « processus de blanchissement », essentiel dans le cadre d’un désir d’ascension sociale. Enfin, Nathalie Dietschy utilise le principe de la photographie pour aborder l’identité fictive. À travers les autoportraits de deux artistes noirs se représentant dans la peau de saint Sébastien, cet article montre l’héritage iconographique occidental en lien avec l’identité revendiquée des artistes.
La seconde partie de ce volume expose les identités sociales et de groupe. En premier lieu, Daniel Arnaud s’intéresse à l’identité qualifiée de « nationale ». Celle-ci est-elle le fruit d’une pure construction ou partage-t-elle une origine commune puisée dans un passé collectif ? L’utilisation qui peut être faite de cette identité dans le présent est également un point essentiel à ne pas négliger. Dans le même ordre d’idée, Angeliki Koukoutsaki-Monnier présente, de façon pluridisciplinaire, l’appartenance nationale, mais cette fois, sous l’angle micro-social, insistant sur le dépassement possible de la distinction des critères organiques et politiques de la nation. Par la suite, Luz Bermudez aborde de manière anthropologique la signification du terme de coleto pour désigner une partie de la population indienne du Chiapas. L’imposition d’une identité renvoie ici aux processus historiques qui ont présidé à sa délimitation. Agathe Cormier, quant à elle, s’inscrit dans le domaine des sciences du langage et traite de l’intersubjectivité par le biais de l’utilisation du nom propre dans la construction identitaire du sujet. Plus spécifiquement, l’identité en linguistique est abordée par Michelle Lecolle, qui nous présente les usages des aspects sémantiques dans les noms collectifs. L’utilisation des phénomènes de langue dans la délimitation de l’identité est ici mise au centre de la réflexion. Enfin, pour clore ce numéro, un article d’ethnologie, rédigé par Jérôme Gidoin, expose le principe de l’ethno-religion. Appréhendée sous l’angle de l’affiliation des Vietnamiens au bouddhisme, celle-ci met l’accent sur la différenciation identitaire en contexte post-migratoire.
Finalement, ces deux numéros auront permis d’interroger la question de l’identité sous un angle spécifique, qui est celui de la fictionnalisation. Qu’elle soit imaginaire, qu’elle fasse écho à la définition et à la présentation de soi (réelle ou non) ou qu’elle ne soit comprise que comme une composition fictive, l’identité, en tant que concept heuristique dans les sciences sociales, ne cesse de s’employer en se diversifiant. La pluridisciplinarité favorise sa compréhension et son enrichissement. Les travaux publiés dans ces deux numéros d’¿ Interrogations ? doivent contribuer à la réflexion sur l’identité comme processus ainsi que sur les schèmes sociaux de sa fictionnalisation.
La rubrique Varia accueille deux articles. L’un, de Séverine Colinet, porte sur l’implication et la désimplication associative de personnes atteintes de la sclérose en plaque. L’auteure s’est intéressée à trois associations et a eu recours à plusieurs méthodes complémentaires afin d’interroger des « carrières » de militants et d’en comprendre la désimplication partielle ou totale. Le deuxième article, de Thierry Poyet, s’intéresse à la relation amicale entre Maxime Du Camp et Gustave Flaubert. Le premier a été éclipsé de l’histoire littéraire par le deuxième, cet article a donc également le mérite de (re)mettre en lumière un écrivain méconnu.
La rubrique Fiches techniques propose deux contributions. Avec Critique des représentations fétichistes du capital, Alain Bihr poursuit l’exposé des différentes dimensions du concept de capital tel que Marx le déploie dans sa critique de l’économie politique. Il s’intéresse plus précisément au processus d’imprégnation des représentations courantes du capital par des apparences fétichistes. Isabelle Vidalenc et Monique Malric nous proposent, quant à elles, un texte intitulé Quels outils pour une démarche réfléxive dans l’activité de recherche ?. Celui-ci aborde l’application de la réflexivité durant l’enquête et démontre l’apport heuristique de trois différents types d’entretiens (non directif, d’auto-confrontation et d’explicitation).
Ce numéro comprend enfin trois notes de lecture. Sont ainsi présentés les ouvrages suivants :
• Louise Fines, Les crimes en col blanc. Théories, stratégies de défense et mouvements du pouvoir, par Pascal Fugier ;
• Gilles Monceau (dir.), 2012, L’analyse institutionnelle des pratiques Une socio-clinique des tourments institutionnels au Brésil et en France, par Claire De Saint Martin ;
• Jacques Coenen-Huther, Comprendre Durkheim, par Gilles Montigny.
Que soient ici remerciés l’ensemble des chercheurs, enseignants, enseignants-chercheurs, membres ou non du comité de lecture, qui ont pris le temps de mener les expertises qui leur étaient confiées et qui ont ainsi permis la mise en ligne de ce seizième numéro de la revue.
Paul Bacot, Maria Benedita Bas, Karim Benmiloud, Alain Bihr, Maurice Blanc, Jean-Michel Butel, Cécile Campergue, Georgeta Cislaru, Pierre Concialdi, Marco Costantini, Pierre Cours Salies, Pascal Engel, Pascal Fugier, Mathieu Gateau, Luis Gomez, Stéphane Haber, Kerstin Jonasson, Daniel Lebaud, Yvan Leclerc, Jean-Marc Leveratto, Philippe Liotard, Anthony Mangeon, Oscar Mazzoleni, Jérôme Meizoz, Louise Merzeau, Françoise Olivier-Utard, Bruno Ollivier, Sophie Papaefthymou, Simone Pennec, Albert Piette, Christine Plasse-Bouteyre, Christopher Pollmann, Georges Roque, Sébastien Rouquette, Monique Selim, Pierre-Emmanuel Sorignet, Anne-Marie Thiesse, Sylvie Triaire, Gaspard Turin, Jean-Louis Vaxelaire, Juan-Pedro Viqueira, Michaël Voegtli, Daniel Welzer-Lang.
Le comité de rédaction
Pour citer l'article :
Comité de rédaction, « Préface n° 16 », dans revue ¿ Interrogations ?, N°16. Identité fictive et fictionnalisation de l’identité (II), juin 2013 [en ligne], https://www.revue-interrogations.org/Preface-no-16 (Consulté le 11 octobre 2024).