Accueil du site > Appels à contributions en cours > Appels à contributions passés > AAC n°19 – Penser l’intersectionnalité


Comité de rédaction

AAC n°19 – Penser l’intersectionnalité

 




Les catégorisations de classe, d’âge, de sexe, de sexualité, de ’race’, etc., contribuent à homogénéiser les groupes, ce qui pose souvent problème pour rendre compte de la réalité sociale dans sa diversité et sa complexité. Comment ’classer’, regrouper afin de monter en généralité, sans être schématique ou caricatural ? Comment décrire les phénomènes de domination tout en évitant le piège de l’abstraction globalisante ? La notion d’ « intersectionnalité » (Crenshaw ; 2005) propose de penser l’entrecroisement des caractéristiques sociales. Elle dé-essentialise en montrant la co-construction des relations de pouvoir à la base des inégalités. D’origine anglo-saxonne, l’approche se focalise sur la construction des identités multiples, conséquentes des formes plurielles de domination (de classe, d’âge, de race, de sexe, de sexualité, etc.). Le Black feminism constitue l’un des premiers objets d’études. Cette attention à la combinaison des rapports sociaux correspond également à des préoccupations de chercheur-e-s francophones à l’instar de ceux de Danièle Kergoat dans son étude pionnière des femmes ouvrières (Kergoat ; 1978). La question de l’articulation des rapports sociaux de classe et de sexe est posée. Cependant, les interprétations en termes d’intersectionnalité sont rejetées au motif qu’elles fragmentent l’analyse du social et contribuent au relativisme (Kergoat, 2012). La réflexion s’est prolongée ultérieurement à travers des études telles que celles d’Elsa Dorlin (Dorlin ; 2006 et 2009). Elle soulève plusieurs questions.

  • Les enjeux méthodologiques : comment appréhender l’intersectionnalité ? Faut-il ’hiérarchiser’ des variables comportementales pour comprendre le social ? Dans quelle mesure se centrer sur un type de rapport social plus qu’un autre peut contribuer à modifier la réalité sociale appréhendée à travers la recherche ? Par exemple, on peut considérer que se focaliser uniquement sur le genre (ou la classe, la ’race’, la sexualité, l’âge, etc.) constitue une imposition de problématique. Cela revient à utiliser une grille de lecture unidimensionnelle du social alors que la réalité est façonnée par de multiples rapports sociaux construisant des identités hétéroclites. Comment dépasser ces biais ?
  • Les enjeux théoriques : en quoi l’intersectionnalité permet-elle d’appréhender les rapports sociaux ? Comment remet-elle en question certaines théories ’classiques’ des inégalités sociales ? La théorie de la « domination masculine » (Bourdieu ; 1998) est-elle infirmée par des études récentes, montrant que la ’féminité’ ne constitue pas nécessairement un handicap social ? C’est, par exemple, le cas en politique dans un contexte d’élections paritaires, a fortiori lorsque la féminité se « cumule » à d’autres caractéristiques reflétant la « diversité », comme la jeunesse ou encore une origine ethnique marginale (Achin et Lévêque ; 2011). Le cumul des « stigmates » (Goffman ; 1975) enferme-t-il toujours dans des positions sociales subalternes ou bien existe-t-il des situations et des configurations permettant de renverser la donne ? Comment s’agencent les différents rapports sociaux ? Faut-il les concevoir dans leur analogie ou bien dans leur imbrication ? Les processus de domination sociale peuvent-ils être transformés, voire subvertis, par leur co-construction ?
  • Ces questions en soulèvent d’autres, d’ordre épistémologique. On se demandera ainsi si une théorisation de l’intersectionnalité est possible. La notion ne signifie-t-elle pas en soi l’abandon de la volonté de saisir dans sa globalité le monde social ? Au-delà d’une description et explication des phénomènes humains, la question témoigne des enjeux théoriques contemporains. L’intersectionnalité est-elle une approche pertinente pour les sciences sociales ? Chercher à prendre en compte la pluralité des expériences risque de faire perdre la capacité à monter en généralité. Quelles autres alternatives sont possibles ?

Entre perfectionnement de la Grounded theory (Strauss et Corbin ; 1990) et déconstructionnisme conduisant à relativiser la pertinence des théories macro-sociales, en particulier structuralistes, les enjeux méthodologiques, théoriques et épistémologiques relatifs à l’intersectionnalité sont nombreux. La revue ¿ Interrogations ? propose de les questionner dans son dix-neuvième numéro et recherche, pour ce faire, des contributions originales et inédites portant sur l’analyse empirique ou théorique de l’imbrication des rapports sociaux, quels qu’ils soient.

Les articles, rédigés aux normes de la revue, au format .doc ou .odt, devront être adressés à Maud Navarre, avant le 31 mars 2014, à l’adresse électronique suivante : mnavarre@laposte.net. Ils ne doivent pas dépasser 50 000 signes (notes et espaces compris).

Les propositions d’articles seront d’abord pré-expertisées par le comité de rédactionqui jugera de sa qualité de mise en forme, de sa lisibilité et de son adéquation avec l’appel à contribution en cours.

Dans un deuxième temps, les articles sélectionnés seront adressés, anonymement, à au moins deux experts indépendants pris dans et en dehors de notre comité de lecture. Ils devront se prononcer sur sa qualité scientifique et méthodologique. Quatre réponses sont possibles de la part des experts : publication envisageable en l’état ; publication envisageable sous réserve de modifications mineures ; publication envisageable sous réserve de modifications majeures ; proposition de rejet.

La liste des propositions retenues sera communiquée, courant juin 2014.

Les contributions définitives devront être transmises à la coordinatrice, au plus tard, en décembre 2014.

Publication du numéro : juin 2015.

Bibliographie

Achin Catherine, Lévêque Sandrine (2011), « L’un chante, l’autre pas. La parité aux élections municipales de 2001 et 2008 » dans Agrikoliansky Éric, Heurtaux Jérôme, Le Grignou Brigitte, Paris en campagne. Les élections municipales de mars 2008 dans deux arrondissements parisiens, Paris, Les éditions du Croquant.

Bourdieu Pierre (1998), La domination masculine, Paris, Seuil.

Crenshaw Kimberlé (2005 [1994]), « Cartographie des marges : Intersectionnalité, politiques de l’identité et violences contre les femmes de couleur », Les Cahiers du genre, 39.

Dorlin Elsa (2006), La matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la Nation française, Paris, La Découverte.

Dorlin Elsa (dir.) (2009), Sexe, race, classe. Pour une épistémologie de la domination, Paris, PUF.

Goffman Erving (1975 [1963]), Stigmate. Les usages sociaux des handicaps [trad. Alain Khim], Paris, Les éditions de Minuit. 

Kergoat Danièle (1978), « Ouvriers = ouvrières ? Propositions pour une articulation théorique de deux variables : sexe et classe sociale », Critiques de l’économie politique, nouvelle série, 5.

Kergoat Danièle (2012), Se battre disent-elles …, Paris, La Dispute.

Strauss Anselm, Corbin Juliet (1990), Basics of Qualitative Research : Grounded Theory Procedures and Techniques, Newbury Park, CA, Sage.


En dehors des articles répondant à l’appel à contributions, la Revue ¿ Interrogations ? accueille volontiers les travaux les plus divers pour ses autres rubriques.

♦ La rubrique « Des travaux et des jours » est destinée à des articles présentant des recherches en cours dans lesquels l’auteur met l’accent sur la problématique, les hypothèses, le caractère exploratoire de sa démarche, davantage que sur l’expérimentation et les conclusions de son étude. Ces articles ne doivent pas dépasser 25 000 signes (notes et espaces compris) et être adressés à Alain Bihr  : alain.bihr@club-internet.fr

♦ La rubrique « Fiches techniques » est destinée à des articles abordant des questions d’ordre méthodologique (sur l’entretien, la recherche documentaire, la position du chercheur dans l’enquête, etc.) ou théorique (présentant des concepts, des paradigmes, des écoles de pensée, etc.) dans une visée pédagogique. Ces articles ne doivent pas non plus dépasser 25 000 signes (notes et espaces compris) et être adressés à Audrey Tuaillon-Demesy : audrey.tuaillon-demesy@univ-fcomte.fr

♦ La rubrique « Varia », par laquelle se clôt tout numéro de la revue, accueille, comme son nom l’indique, des articles qui ne répondent pas aux différents appels à contributions ni aux rubriques précédentes. Ils ne doivent pas dépasser 50 000 signes (notes et espaces compris) et être adressés à Hélène Cléau : cleauhelene@yahoo.fr

♦ Enfin, la dernière partie de la revue recueille des « Notes de lecture » dans lesquelles un ouvrage peut être présenté de manière synthétique mais aussi critiqué, la note pouvant ainsi constituer un coup de cœur ou, au contraire, un coup de gueule ! Elle peut aller jusqu’à 12 000 signes (notes et espaces compris) et être adressée à Sébastien Haissat : sebastien.haissat@wanadoo.fr. Par ailleurs, les auteurs peuvent nous adresser leur ouvrage pour que la revue en rédige une note de lecture à l’adresse suivante : Sébastien Haissat, UPFR Sports, 31 chemin de l’Epitaphe – F, 25000 Besançon. Cette proposition ne peut être prise comme un engagement contractuel de la part de la revue. Les ouvrages ne seront pas retournés à leurs auteurs ou éditeurs.

Pour citer l'article


Comité de rédaction, « AAC n°19 – Penser l’intersectionnalité », dans revue ¿ Interrogations ?, Appels à contributions en cours [en ligne], https://www.revue-interrogations.org/AAC-no19-Penser-l (Consulté le 19 mars 2024).



ISSN électronique : 1778-3747

| Se connecter | Plan du site | Suivre la vie du site |

Articles au hasard

Dernières brèves



Designed by Unisite-Creation